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Benjamin FERNIOT, Directeur du développement et des relations institutionnelles France de SUEZ

Au lendemain de la COP21, quels sont pour vous les grands enjeux ?

Que ce soit dans le domaine de l’eau ou des déchets, nous sommes en première ligne pour constater que nous devons agir et vite. Il y a d’un côté la volonté politique qui est indispensable. De l’autre, la mobilisation de tous les acteurs et parties prenantes qui l’est tout autant : que ce soient les citoyens, les associations, les entreprises, nous avons tous un rôle à jouer. L’économie peut contribuer fortement à servir les objectifs de l’accord de la COP21. Il faut réconcilier compétitivité et changement climatique faire comprendre que les objectifs ne sont pas une contrainte, mais une opportunité. Nous croyons en cela à la promotion d’une économie circulaire.

Vous parlez d’économie circulaire, quelles sont les implications concrètes pour les villes ?

 Les villes ont un rôle important à jouer. Grâce à une connaissance parfaite de leurs industries, de leurs agricultures, de leurs richesses et de leurs potentiels, les villes sont à même de créer des synergies entre les différents acteurs, de créer des passerelles et de décloisonner les approches. Comme le rappelle souvent le gouvernement, c’est avec les territoires que nous allons donner une réalité à la transition énergétique. Et nous sommes là, en tant que partenaire et acteur de l’environnement, pour accompagner les villes dans cette mutation.

Je vais vous donner quelques exemples :

Au Havre, l’unité de valorisation énergétique des déchets Ecostu'air, appartenant au Sevede et exploitée par SUEZ, alimente en énergie verte l'industriel Tereos pour couvrir près de 70% de ses besoins énergétiques. L'énergie verte produite est composée d'électricité (27.500 MWh par an) mais aussi de vapeur (330.000 MWh par an).

En partenariat avec le Mans métropole qui a créé «Valor Pole 72», nous exploitons un centre de tri qui vise à extraire des déchets, tous les matériaux susceptibles de constituer une ressource matière et énergétique. Ainsi, les métaux ferreux sont triés pour la fabrication de nouveaux objets, comme des vélos, à partir de 630 canettes.

Tous ces exemples ont un point commun : la volonté des collectivités et des élus de faire de leur ville un territoire exemplaire et de créer des synergies entre tous les acteurs publics et privés.

Comment appréhendez-vous la réforme territoriale qui vient d’être adoptée par le Parlement ?

Nous vivons un moment de grande mutation de l’organisation territoriale. D’abord la loi de Modernisation de l’Action Publique dans les Territoires et d’Affirmation des Métropoles (MAPTAM). Puis le nouveau découpage des régions avec la création de 13 grands territoires. Et enfin la loi Nouvelle Organisation Territoriale de la République (NOTRe) qui a été adoptée cet été. Ce sont trois étapes majeures pour les territoires, les élus et les citoyens, mais aussi pour les acteurs économiques comme SUEZ dont l’ancrage territorial est très fort. Pour nos métiers, que ce soit dans l’eau, le traitement de l’eau, les déchets ou l’ingénierie, nous devons adapter notre organisation en interne, mais aussi adapter la manière d’accompagner nos clients dans la gestion des services publics.

Concrètement quels sont les impacts de cette réforme ?

À partir de 2020, les compétences en matière d’eau et d’assainissement reviennent obligatoirement aux intercommunalités et les déchets à partir de 2017. Nos interlocuteurs de demain seront les représentants des services et les élus des intercommunalités quand, aujourd’hui, ils pouvaient être dans les communes, les intercommunalités ou les syndicats. Par ailleurs, cela va réduire considérablement le nombre de contrats puisque le nombre d’autorités adjudicatrices va diminuer.

Le seuil pour créer une intercommunalité passe de 5000 à 15000 habitants. Nous aurons donc en face de nous des interlocuteurs plus importants, avec des exigences et des problématiques différentes. La planification de la gestion des déchets se fera désormais au niveau régional et plus départemental. Là encore, la problématique de la gestion des déchets ne sera plus là même en passant d’une vision de 100 départements à celle de 13 régions. Le phénomène métropolitain va aussi faire naître de nouvelles problématiques urbaines et d’aménagement des villes auxquelles nous devrons répondre avec des solutions concrètes pour les élus. Mais légitimement, des questions se posent sur les conséquences et les implications concrètes notamment pour les collectivités qui devront mettre en œuvre ces dispositions. Comment garantir un service efficace et de proximité sur des territoires étendus ? Quelle gouvernance de ces services ? Quel coût pour la collectivité ?

Et pour SUEZ, cela change la manière de proposer vos services ?

Nous entendons ce que nous disent nos clients. Adaptez-vous, proposez des solutions innovantes ! Nous avons l’obligation de nous structurer sur les territoires, d’être plus forts plus présents. C’est une nécessité à l’heure où les territoires changent et se structurent. Les collectivités locales expriment une forte attente de coordination dans nos approches. Ces enjeux exigent d’apporter une réponse nouvelle. Nous avons besoin d’avoir une action qui allie coordination, cohérence et synergie. Notre premier impératif a été de penser et mettre en place une organisation territoriale décentralisée du groupe. Ainsi, auprès de chaque agglomération ou métropole, il est institué, à partir du 1er janvier 2016, une représentation institutionnelle unique du Groupe, avec des délégués territoriaux qui seront les référents de SUEZ dans les territoires.

On parle beaucoup de smart cities, de nouvelles technologies, de villes connectées : avez-vous intégré ces données ?

D’ici 15 ans, l’urbanité sera devenue le mode de vie dominant, un mode de vie qui nécessitera une révolution numérique pour répondre aux nouveaux usages. Une révolution qui aura pour objectif une meilleure gestion des villes couplée à une amélioration du quotidien des citoyens. Face à une urbanisation croissante, l’innovation technologique et numérique répond aux besoins des collectivités, facteur de modernisation et de dynamisation des territoires. Elle facilite la gestion de l’action publique en permettant une gestion plus efficace des données et du service. Elle permet aussi s’agissant de l’environnement, une gestion plus sobre des ressources. Par exemple, à Bordeaux, SUEZ a développé « Aquadvanced », un outil de gestion dynamique du réseau pluvial en cas d’épisodes pluvieux intenses qui permet de maîtriser le risque d’inondation urbaine et de faire face à la recrudescence des épisodes météorologiques extrêmes. À Mulhouse, en collaboration avec Engie, nous avons mis en place un tableau de bord qui collecte l’ensemble des données de la ville, les connecte et en facilite la compréhension en temps réel. Nous avons inauguré à Lyon le premier centre de contrôle Viso 360° composé d’outils technologiques qui permettent de suivre en temps réel les réseaux d'eau de 763 collectivités de Rhône-Alpes et Auvergne. Ce sont des exemples qui seront à moyen terme généralisés à tout le territoire. C’est par et avec l’innovation que nous parviendrons à construire les villes et territoires durables de demain.

SUEZ
SUEZ est présente sur les cinq continents, avec 81 000 collaborateurs, pour apporter des solutions concrètes dans 4 activités : l’eau, le recyclage et la valorisation des déchets, le traitement de l’eau et le consulting. Face à l’augmentation de la population mondiale, l’urbanisation croissante et la raréfaction des ressources naturelle, SUEZ a orienté ses activités pour sécuriser, optimiser et valoriser les ressources. Depuis mars 2015, l’ensemble de ces filiales est réuni sous une même bannière. Que ce soient Lyonnaise des Eaux, Sita, Degrémont ou Safège, toutes les entreprises du Groupe deviennent SUEZ.

 
Benjamin Ferniot

Directeur du développement et des relations institutionnelles et membre du comité exécutif, Benjamin FERNIOT est entré dans le Groupe en 2009. La mission de sa direction est d’accompagner et soutenir les différentes filiales dans leurs approches territoriales. Rencontre avec un parfait connaisseur des territoires.